top of page

Lady Bird est-il le meilleur film de l'histoire?




La semaine dernière, Lady Bird devenait officiellement le « meilleur film de l’histoire » sur le site Rotten Tomatoes en obtenant un score de 100% de critiques positives pour 170 avis postés. Depuis sa sortie le 3 novembre, le film ne cesse de générer l’enthousiasme tant du côté des critiques cinéma que des spectateurs. Cela a attiré notre attention : que vaut le premier long métrage solo de la réalisatrice Greta Gerwig ?


Le film raconte l’histoire de Christine, qui s’est elle même renommée « Lady Bird ». Lady Bird est une jeune lycéenne de dix-sept ans qui a grandi et vit à Sacramento en Californie. Elle déteste cette ville, elle déteste sa vie là-bas et ne rêve que d’être acceptée à l’une des grandes universités libérales de la côte est ; là où la culture règne et les grands esprits vivent selon elle. Le film suit Lady Bird tout au long de sa dernière année de lycée et explore sa relation conflictuelle avec sa mère, ses premiers amours et sa quête de reconnaissance.




Un film unique dans son genre


Une crise d’identité, une relation difficile avec ses géniteurs et une tonne de petites aventures romantiques ; à première vue Lady Bird combine tous les ingrédients du film de « coming of age » basique où un/e adolescent/e découvre qui il/elle est vraiment. Il se distingue cependant légèrement des classiques du genre de par son authenticité et la fluidité de son rythme. Les spectateurs n’ont pas du tout l’impression de faire face à une recette préfabriquée d’un film adolescent : on sent que le but de Greta Gerwig n’est pas de donner de leçon sur comment trouver son identité et bien se sentir dans sa peau. Elle semble plutôt vouloir explorer les affres de l’adolescence en observant ses personnages évoluer sans jamais les juger. Le film montre plutôt que de démontrer, ce qui lui confère un rythme très agréable à suivre. Le spectateur n’est pas dans l’attente des scènes et étapes clichées qui parsèment généralement les films abordant un sujet similaire ; au contraire, il se laisse porter par les frasques de Lady Bird pour mieux savourer le film.




Des personnages authentiques


L’authenticité des personnages contribue également grandement à rendre le film si agréable à regarder. Ici, ce sont les personnages qui portent l’intrigue et non l’inverse, ce qui distingue une fois encore Lady Bird des films de son espèce. Les personnages ont tous des défauts et des qualités, des motivations et des devoirs, ce qui les rend somme toute très humains. C’est le cas même pour les personnages les plus clichés (car après tout que serait un « teen movie » sans sa « hit girl ») dont les réactions surprennent parfois. Là où Lady Bird excelle tout particulièrement, c’est dans sa représentation des relations mère/fille. La relation entre Lady Bird et sa mère est en effet très complexe et ambiguë. Gerwig arrive à montrer simultanément à quel point ces deux femmes s’aiment profondément tout en ne pouvant pas s’empêcher de chercher à se détruire mutuellement. Il s’agit probablement d’une des meilleures explorations du sujet au cinéma depuis des années.



Des acteurs exceptionnels


Le jeu excellent des nombreux acteurs talentueux du film consolide l’authenticité des personnages et des situations. Saoirse Ronan livre une performance très juste et incarne une Lady Bird à la fois touchante et impressionnante. Lucas Hedges, révélé par Manchester By The Sea l’an dernier, surprend de sensibilité dans son rôle de prétendant et confirme qu’il est un acteur à suivre. Timothée Chalamet (à voir prochainement dans l’excellent Call My By Your Name) qui joue l’autre prétendant de l’héroïne est lui aussi impressionnant tant il arrive à rendre son personnage simultanément détestable de par son flegme et attirant de par son charisme. Laurie Metcalf pour sa part est tout bonnement incroyable. Comme le dit le personnage de Lucas Hedges, la mère de Lady Bird est à la fois un personnage profondément bon et profondément terrifiant. Laurie Metclaf incarne ce paradoxe à merveille et parvient à rendre son personnage simultanément glacial et rigide, et attachant et émouvant. Il s’agit probablement là d’une de ses meilleures prestations au cinéma, et l’Académie des Oscars y sera probablement très sensible.




Un scénario néanmoins très banal


Ce quatuor gagnant d’acteurs indé talentueux est d’ailleurs l’arme secrète du film. Car il faut avouer que si les personnages diffèrent de la norme, le scénario est quant à lui loin d’être original. De fait, sans les performances de ces acteurs talentueux, le film ne serait probablement pas le même et pourrait paraître très classique. Au final, même si ce sont les personnages qui dirigent l’intrigue, cette dernière reste très évidente et sans réelle surprise. Grâce à l’authenticité de ses héros, Gerwig parvient à justifier les clichés de l’histoire d’adolescent type mais ne les éradique pas réellement. Le rythme envoutant de son œuvre et les performances enchanteresses de ses acteurs distraient en effet les spectateurs de la structure somme toute très classique du scénario. En outre, si l’adolescente apprend comment gérer ses relations avec les autres, elle ne semble pas connaitre de réelle évolution personnelle entre le début et la fin de son année scolaire. Le personnage de Lady Bird n’est conséquemment pas aussi complexe et intéressant qu’il ne pourrait l’être s’il avait été muni d’une psychologie plus intriquée. Les dernières scènes du film compensent un peu ce bémol en soulevant certains paradoxes chez la jeune fille, malheureusement elles paraissent précipitées et laissent à l’œuvre un goût de travail non fini.




Une oeuvre visuellement peu originale


En outre, à l’image de son scénario, la mise en scène et la photographie du film ne présentent pas non plus une grande originalité. Cela ne constitue pas réellement un défaut en soit puisque le film reste très agréable à regarder ; seulement, si l’on va voir le film en espérant faire face à la pépite indie que les critiques nous vendent, on risque d’être déçu de ce manque d’audace visuelle. Etant donné le sujet du film et la nature espiègle de Lady Bird, une mise en scène plus poétique avec des cadrages plus symboliques et une colorimétrie plus imaginative auraient réellement servi le propos du film.




Un Grand Film? Oui. Le Chef d'Oeuvre de l'histoire? Certainement pas


Au final Lady Bird est sans aucun doute un « grand film », mais certainement pas un chef d’œuvre. L’authenticité de ses personnages et des relations qu’ils ont entre eux sortent de l’ordinaire, et le jeu de cette collection d’acteurs tous plus talentueux les uns que les autres permet au film de se distinguer de ses semblables. Néanmoins, le considérer comme le chef d’œuvre de 2017, voire de l’histoire du ciné indie est peut être exagéré. Le scénario pèche par son manque d’originalité, tout comme sa mise en scène peu fantaisiste. Si Lady Bird reste un premier film charmant et très agréable à regarder qui affiche le talent de Gerwig, il serait hâtif de déjà le consacrer comme un film culte.

POSTS RÉCENTS :
PAR TAGS :
Pas encore de mots-clés.
bottom of page