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Pourquoi Blade Runner 2049 n'a t'il pas été sélectionné aux Golden Globes?









La sélection officielle des Golden Globes vient de tomber, et, surprise, l’un des films les plus populaires de l’année, tant auprès des spectateurs que de la critique, ne reçoit aucune nomination. Il s’agit de Blade Runner 2049 réalisé par le Canadien Denis Villeneuve, le sequel du culte Blade Runner de Ridley Scott sorti en 1982. Suite au succès de son Premier Contact l’an dernier, Villenuve a été investi de la difficile tâche de réaliser une suite à la hauteur du film original. Les attentes étaient hautes, mais selon la presse internationale Villeneuve a globalement réussi son pari, ce qui cause la surprise de ne pas le voir sélectionné aux Golden Globes, autrement nommés l’antichambre des Oscars. Mais Blade Runner 2049 méritait-il réellement une sélection ?



L’action de Blade Runner 2049 se déroule trente ans après celle du premier opus. Suite à une crise économique survenue au cours des années 2020, la société Tyrell, qui s’occupait de produire des réplicants (des humanoïdes issus de l’ADN humain utilisés par les hommes afin d’accomplir les tâches les plus ingrates), fait faillite. L’entreprise de conception d’humanoïdes a depuis été reprise par la compagnie Wallace, qui crée désormais des réplicants plus dociles que les anciens. K (Ryan Gosling) un agent blade runner issu de cette nouvelle génération de réplicants, est chargé de chasser et détruire les « anciens » réplicants encore existants de la précédente génération. En effet, les anciens modèles sèment le trouble selon le gouvernement, puisque la plupart d’entre eux tentent de s’affracnhir de leur condition d’esclave afin de vivre comme des humains. Lors d’une de ses missions, K découvre une mystérieuse boîte enterrée au pied d’un arbre. Le contenu de cette boîte renferme un terrible secret qui pourrait conduire le monde à questionner la frontière entre réplicants et humains. En possession de cette boîte, K devient la cible de l’entreprise Wallace. Traqué, il n’a d’autre choix que de se lancer à la recherche du plus grand des blade runners Rick Deckard (Harrison Ford, héro du premier opus) afin que ce dernier ne l’aide à éclaircir ce mystère.



Une photographie incroyable


Ce qui frappe dès les premiers plans de Blade Runner 2049 et fait l’objet de nombreuses critiques positives, c’est la qualité incroyable de sa photographie. Il est vrai que les tableaux composés par Roger Deakins sont réellement impressionnants. Tout y est parfait : le cadrage, la composition, la couleur, les lumières… chaque nouveau plan surpasse le précédent et scotche le spectateur à son siège face à tant de splendeur. Tout est pensé et millimétré afin de combler visuellement le spectateur. Il est impossible de décrire par les mots ce que l’on ressent face à une photographie aussi grandiose. Roger Deakins maîtrise son art dans tous les décors, qu’il s’agisse de campagnes abandonnées ou de la ville surpeuplée, des déserts arides ou de paysages noyés sous la pluie, des quartiers les plus pauvres de Los Angeles ou des bureaux très élégants de la Wallace Compagny. La prestance de ses décors est tellement écrasante qu’elle met finalement tout le monde au même niveau, qu’il s’agisse des humains ou des réplicants, ce qui sert très bien le propos du film.



Un véritable film noir


De fait, la photographie couplée au rythme très lascif du film restitue très bien l’ambiance de film noir que le film original possédait. Les performances technologiques impressionnantes du film et son sujet en font bien évidemment un film de science fiction, mais son atmosphère pesante semble indiquer que Villenuve cherche ici à produire avant tout un authentique film noir. Tous les codes y sont: le détective lui même mystérieux et peu loquace (rôle qui va d’ailleurs comme un gant à Ryan Gosling qui offre ici une de ses meilleures performances), la femme fatale potentiellement dangereux pour ledit détective, le mystère dont l’élucidation va conduire à une remise en question totale de l’ordre établi. Mais plus encore que ses codes scénaristiques, ce qui fait du film une réussite du genre, c’est son atmosphère. Qu’il s’agisse des couleurs sombres des compostions, des lumières sordides des néons de la ville, du voile brumeux que tour à tour la pluie et les tempêtes de sable produisent, des coiffures et tenues archi stylisées des personnages, tout dans le film traduit le mystère, le doute, la remise en question et le danger imminent de cette remise en question. Cette atmosphère pesante du film permet aux spectateurs de totalement s’immerger dans l’intrigue du film.



S'identifier aux réplicants


Un autre côté positif de la lourdeur de cette atmosphère et de la photographie est qu’elle aide les spectateurs à s’identifier aux réplicants. En effet, si l’image est magnifique, elle manque totalement de poésie et de légèreté, ce qui a pour conséquence d’annihiler les perceptions des spectateurs, de sorte à ce que ceux-ci deviennent eux même des quasi-humanoïdes. La photographie n’a jamais autant bien portée son nom qu’ici : chaque nouveau plan ressemble à une photographie de papier glacé parfaite. Par conséquent, l’image manque parfois de fluidité dans sa composition, ce qui consolide l’impression du spectateur d’être confronté à la perception de la réalité qu’ont les réplicants. Cette impression sert le propos du film qui questionne l'essence de l’humanité.



Une beauté écrasante


Néanmoins, cette atmosphère froide de catalogue de luxe est aussi une limite de Blade Runner 2049. En effet, la magnificence des plans est parfois écrasante, et pour un film long de plus de 2h40, cela devient problématique au bout d’un certain moment. L’ambiance du film est très anxiogène, ce qui est bien sûr un effet voulu du réalisateur puisque cette atmosphère angoissante va de mise avec le thème et le genre qu’il explore ; cependant, cela devient vite pesant, voire désagréable. Le film aurait sûrement gagné à inclure plus de poésie dans ses scènes, puisque même les scènes qui se prêtaient à une ambiance plus légère sont au final des manifestations d’avancées technologiques désincarnées. Plus les minutes passent et plus le spectateur a l’impression de perdre souffle, ce qui contraste d’une manière peu agréable avec la lenteur du film, et peut facilement harasser l’audience.




Un rythme trop lent et pesant


Le rythme du film est effet très lent, ce qui devient exaspérant passé un certain stade de l’intrigue, et ce notamment pour une audience actuelle habituée à la vitesse d’enchaînement des actions dans les films de nos jours. Le film dure 2h44 là où il pourrait en faire 2h10, et sa longueur désengage parfois l’audience qui ne comprend pas pourquoi tant d’étapes sont nécessaires pour mener le héro là où il finit. Une telle longueur aurait en effet pu être justifiée si elle servait de nombreux rebondissements ou développements, mais ici elle ne semble pas nécessaire puisque le scénario est au final très simple, voire simpliste. Le fait d’enchaîner certaines scènes qui s’étendent en longueur donne l’impression au spectateur qu’il fait face à une énigme très alambiquée, ce qui au final, lorsque l’on est capable de se concentrer sur la substance du film, s’avère complétement faux.



Un scénario plutôt basique


En effet, le scénario de Blade Runner 2049 est loin d’être épiphanique. Le film part pourtant sur de bonnes bases en offrant des amorces de réflexion extrêmement intéressantes. La quête de K pousse à se demander qu’est ce qui différencie un réplicant d’un être humain, et donc d’interroger ce qui fait l’essence de l’humanité. Sa relation avec une fiancée virtuelle explore la question des relations humaines à l’air numérique, et questionne quelle valeur donner à une relation dont le but est prédéfini à l’avance. Les intentions mystérieuses de Wallace pousse l’audience à réfléchir à la notion de surhomme et à la fascination qu’ont les humains quant à la création de ce qui pourrait les dépasser, voire les annihiler. Cependant, le scénario ne fait qu’effleurer ces idées sans réellement les développer. La quête de K devient trop vite matérialisée de sorte à ce que l’aventure entourant la résolution de l’intrigue prend le pas sur la réflexion que celle-ci aurait pu suggérer. Par conséquent, le film passe complétement à côté de son propos en évitant de développer toutes ces questions, puisque les désirs et les motivations des personnages n’évoluent pas du tout entre le début et la fin du film.




Que dire de sa non sélection aux Golden Globes?


Blade Runner 2049 est donc un joyau brut visuel : un objet à la fois magnifique et hypnotisant, mais aussi froid et dur. De fait, si la photographie époustouflante du film va probablement marquer les mémoires pendant longtemps, son intrigue quant à elle est beaucoup moins remarquable. Au final, l’ambiance anxiogène du film prend le pas sur le plaisir visuel qu’il génère, de sorte à ce que l’on souffre de sa longueur accablante. On se demande pourquoi Denis Villeneuve a désiré réaliser un film aussi long pour finalement si peu développer la réflexion qu’il y a derrière son œuvre. Les vrais fans du premier film ne seront néanmoins probablement pas déçus puisque Blade Runner 2049 respecte totalement l’atmosphère de son prédécesseur. Ceux qui sont moins fans du genre risquent quant à eux de s’ennuyer un peu et de sortir frustrés de la séance. Dans tous les cas, Blade Runner 2049 est un film à voir sur grand écran si l’on veut savourer correctement son incontestable qualité visuelle. Blade Runner 2049 ne mérite probablement pas une nomination de meilleur film aux Golden Globes, en revanche le voir privé d’une nomination pour la meilleure photographie aux Oscars serait injuste. Nous en saurons plus sur le sort du film le 28 Janvier 2018, date de la publication des nominés à la plus prestigieuse des récompenses cinématographiques.

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